L’éloge
de la Folie, Erasme
Érasme a bien connu les institutions
religieuses puisqu’il entre au couvent dès son adolescence. Mais il développe
très vite un véritable esprit critique envers la vie monacale. Grâce à sa
curiosité intellectuelle et sa fréquentation des humanistes européens, il
devient une référence et participe au grand mouvement humaniste de
l’Évangélisme. L’Éloge de la Folie est sans doute son oeuvre la
plus célèbre. Il y met en scène Moria (la folie, en latin) pour critiquer la
société de son époque. Dans l’extrait que nous allons étudier Moria fait un
portrait peu flatteur des ordres religieux.
·
Enonciation : C’est bien Moria qui parle dans ce texte.
Les indices de la première personne y renvoient à Moria (« à mon
sens », « grâce à moi »)
L’auteur choisit de faire parler la Folie pour que son propos soit plus
convaincant. La prosopopée est une figure de pensée qui «
consiste à mettre en scène une personne qui n’est pas là, comme si elle était
présente, ou à donner la parole à une chose muette ou abstraite »
En disant
qu’elle apporte une aide aux hommes en leur permettant de croire à leur
déraison, elle permet en même temps de faire comprendre au lecteur combien ces
hommes dits « religieux » sont éloignés du message du Christ. L’idée
est reprise à la fin du texte : « en attendant, grâce à moi, ils
jouissent de leur espérance. »
L’autre voix
présente dans ce texte est celle du Christ lui-même. Même si Erasme invente ces
propos le but est évidemment de revenir au message évangélique.
·
Critique des ordres religieux : Cette
critique est explicite puisque Moria les compare à des ânes. « Quand ils braient comme des ânes dans les
églises. » Dans la tradition proverbiale l’âne est considéré comme un
animal stupide. Cela signifie que les
moines ne savent pas chanter mais surtout qu’ils ne comprennent pas le sens de
ce qu’ils chantent.
La critique se
poursuit grâce à une autre comparaison : « ils beuglent aux
portes » qui assimile les Religieux mendiants (c’est-à-dire des Religieux
qui font vœu de pauvreté au point de devoir demander aux hommes leur moyen de
subsistance) à des bovins. Ces défauts
sont explicités à la fin du paragraphe : « de la saleté et de
l’ignorance, de la grossièreté et de l’impudence »La comparaison continue
et montre les moines agressifs : « des guêpes » qui rappelle que
les moines ont le pouvoir de calomnier les gens et les critiquer dans les
sermons. Enfin les moines ressemblent à des chiens : « Ils ne
cesseront d’aboyer que si on leur met la pâtée dans la bouche »
comparaison qui n’est pas sans rappeler le monstre Cerbère qui ne peut être
amadoué que par « une boulette soporifique de miel et de fruits
traités. » Les moines ne sont pas seulement stupides mais ils sont aussi
méchants.
·
La critique principale des ordres religieux
vient de leur caractère hypocrite. Ils sont loin du message évangélique et leur
comportement absurde ressemble à celui des pharisiens que Jésus dénonçait
violemment en son temps : « vous nettoyez l’extérieur de la
coupe mais celle-ci est remplie d’immondices ».
·
Moine vient du terme « monos » :
seul. Or les moines décrits dans ce texte vivent dans le
monde : »Personne ne circule davantage en tous lieux que ces
prétendus solitaires. »
·
L’hypocrisie vient aussi de la
« règle », celle qui définit les préceptes disciplinaires des membres
d’une même communauté. Or cette règle perd de son sens puisqu’elle devient un
moyen de se différencier des autres ordres : « se différencier entre
eux. »
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