dimanche 1 mars 2015

Fiche récapitulative Excipit, l'Etranger de Camus

Fiche récapitulative : Camus, L’Etranger, excipit, à partir de « Alors, je ne sais pas pourquoi… » jusqu’à la fin.


 l’Étranger est un roman d’Albert Camus qui retrace une partie de la vie de Meursault, personnage-narrateur, personnage étrange et étranger aux conventions sociales, qui a été conduit  à tuer un arabe, et qui est condamné à mort. Peu de temps avant son exécution, un aumônier entre dans sa cellule et voudrait lui parler d’amour divin et de repentir. Mais ses paroles mettent Meursault hors de lui. Après une longue et terrible révolte contre lui, Meursault a paradoxalement, avant mourir la capacité d’éprouver un sentiment de bonheur et d’en avoir une pleine conscience.
Nous tenterons donc de voir comment, par sa révolte et sa prise de conscience  de toute l’absurdité de la condition humaine, Meursault parvient à la paix et à une forme de bonheur.




Une construction très rigoureuse

·         Construction en deux parties, très nettement séparées dans l’extrait : « alors, … » et « lui parti, j’ai retrouvé mon calme » qui s’articulent autour de la présence et de l’absence de l’aumônier.
·         Deux narrations très différentes. La première partie au Discours indirect libre fait entendre toute la révolte de Meursault contre l’aumônier, et la seconde prend la forme d’une méditation lyrique sur la paix et le bonheur.



Une révolte libératrice


·         La révolte est violente : les expressions très fortes  « crier à plein       gosier », « déversais sur lui tout le fond de mon cœur »,  « bondissements mêlés de joie et de colère », « j’étouffais en criant ceci » en témoignent.
·         Elle et aussi libératrice : Meursault commente lui-même sa colère comme la condition d’une délivrance « comme si cette grande colère m’avait purgé du mal, vidé d’espoir », et la répétition de « pour la première fois » en seconde partie montre l’accès à un état de conscience nouveau.
·         Elle est présente dans les derniers mots du texte, avec « les cris de haine » qui signifient que Meursault meurt révolté contre les hommes.



L’affirmation de soi


·         Cette affirmation de soi est perceptible avec  la très forte présence de la première personne : « Moi, j’avais l’air », « Mais j’étais sûr de moi », « Oui, je n’avais que cela ».
·         Elle s’exprime aussi dans la conscience, la réflexion  du personnage sur son existence présente et passée : «  J’avais eu raison », « la merveilleuse paix entrait en moi comme une marée », « j’ai senti que j’avais été heureux, et que je l’étais encore ».



La libération de Meursault est perceptible dans son rapport nouveau avec le temps

·         Tout au long du roman, nous avons vu que Meursault était sans arrêt prisonnier d’un temps limité  au temps présent et au passé ou futur très proche.
·         Ici, pour la première fois, le narrateur envisage sa vie dans un champ temporel beaucoup plus large, emploie le plus-que-parfait, évoque un futur : « du fond de mon avenir… ». Au moment de mourir, sa vie prend une importance dans le temps encore inédite,  avec l’ image du « souffle obscur » qui « remonte » du futur.
·         Il semble que les trois temporalités se mélangent alors, se confondent dans un instant présent qui englobe tous les temps. Rien d’étonnant qu’il se sente « prêt à tout revivre » : il en a la possibilité, dans ce nouvel étirement infini du temps.


Cette libération est perceptible aussi dans le refus assumé, conscient des certitudes communes des hommes

·       Il affirme que les certitudes de l’aumônier ne sont que des postures vaines et illusoires: « il avait l’air si certain, n’est-ce pas ? Pourtant, aucune de ses certitudes ne valait un cheveu de femme ». « Il n’était pas sûr d’être en vie puisqu’il vivait comme un mort ». Derrière l’évidente critique des dogmes religieux et particulièrement catholiques, on a aussi la critique de toute forme de certitude a priori, de tout dogme, dans quelque domaine que ce soit.
·        Contrairement à l’opinion commune, Meursault récuse toute échelle de valeur. « Le chien de  Salamano valait autant que sa femme », « Il n’y avait que des privilégiés ». Les comparatifs d’égalité en témoignent : « autant que », « aussi que ». Meursault récuse donc aussi toute forme de jugement moral, comme le montre l’anaphore de « Qu’importait ».
·      Meursault  réutilise le vocabulaire du prêtre : « élire », « frères », « destin », « privilégiés », mais pour montrer que la religion est  inutile face à la mort.Le fait de penser  cette réalité permet donc enfin à Meursault de s’affirmer pleinement : « Mais j’étais sûr de moi, sûr de tout, plus sûr que lui, sûr de cette vie et de cette mort qui allait venir ». Cette lucidité, ce savoir enfin inébranlable procure alors à Meursault un sentiment de force.
·      Meursault  s’endort, et se réveille « avec des étoiles sur le visage ». Ne peut-on pas lire ici une forme de mort et de renaissance symboliques ?


La possibilité du bonheur

·         Ce qui, finalement, rapproche la mère et le fils, c’est la découverte d’un bonheur qui, à la fin de leur vie, leur a été commun, c’est aussi la conscience que la proximité de la mort montre tout le prix du seul bonheur possible : le bonheur terrestre.
·         Le bonheur passe   par l’acceptation de la mort, qui est désignée par des euphémismes « des départs pour un autre monde », « où des vies s’éteignaient », pour montrer qu’elle n’a rien de terrorisant, et peut paraître douce  aussi, par l’acceptation de la finitude, de l’absurdité de la vie « toute cette vie absurde que j’avais menée ». Il passe aussi par  la révolte salvatrice contre les jugements des hommes.
·         Il trouve sa forme dans un attachement à la plénitude des sensations. Après son court sommeil, c’est toute la nature que Meursault  redécouvre par les sens : « des bruits de campagne », « des odeurs de nuit, de terre et de sel », « comme une marée ».
·         Mais il se découvre surtout comme faisant partie intégrante de ce monde. Ainsi le montrent les harmonies  entre les éléments et lui : les odeurs « rafraîchissaient [ses] tempes », « les étoiles sur [son] visage », la nuit qui « entrait en [lui] comme une marée ». Cette communion absolue avec la nature relève d’un lyrisme cosmique. Meursault se retrouve alors lié charnellement, sensuellement au monde: « de l’éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin ». 


Conclusion : Dans ses Carnets, Camus écrit : « La mort ! À continuer ainsi, je finirai bien par mourir heureux ». C’est ce paradoxe que l’on retrouve de manière évidente dans notre épilogue, ainsi qu’un autre également présent dans les Carnets : « Pessimiste quant à la condition humaine, mais optimiste quant à l’homme ». Ces deux citations résument l’essentiel de notre texte. C’est à travers la révolte, la colère, la violence que l’homme découvre l’absurdité de la condition humaine et la possibilité d’un bonheur terrestre.


Questions envisageables :
Comment ce passage témoigne-t-il de l’évolution de Meursault au cours du roman ?
En quoi peut-on dire que le héros meurt révolté?

Comment Meursault découvre-t-il la possibilité du bonheur ?

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